Jagaaan

JAGAN © 2017 MUNEYUKI KANESHIRO/ KENSUKE NISHIDA

Les éditions Kaze continuent de combattre le marchand de sable en ce début 2019 ! Leur nouveau titre JAGAAAN nous promet de belles frayeurs à coup de métamorphoses glauques et de morale qui frôle la psychopathie ! De quoi nous frapper en plein coeur !

Ah c'est certain, il ne fait pas rêver Jagasaki avec son sourire forcé, son corps maigrelet et ses cernes sous les yeux ! Flic de quartier, le pauvre bougre mène une vie de pantouflard, se contentant d'arrondir les angles sur le plan professionnel et sentimental. Lassé du peu de respect qu'on lui donne, il se rêve grand "justicier" le soir et fantasme en s'imaginant coller une balle dans la tête de tout son entourage. Mais entre policier et assassin, il y a un pas que Jagasaki n'est pas prêt à franchir. Ironie du sort, en voulant trop bien faire son travail, notre héros se retrouve spectateur d'une tuerie en plein milieu du métro, oeuvre d'un monstre qui deux minutes plus tôt était encore un homme lambda ! 

Et si nos pulsions prenaient le pas sur notre raisonnement au point de nous transformer en machines à tuer ? C'est le pari fou que font Muneyuki KANESHIRO, scénariste rôdé (qu'on retrouvera également chez Ki-oon avec AKÛ, LE CHASSEUR MAUDIT en février prochain) et Kensuke NISHIDA (scénariste de BILLION DOGS chez Akata). Si le pitch peut rappeler MIRACULOUS LADYBUG, la forme est bien différente. La violence a écrasé les gentilles coccinelles dès les premières pages. Et c'est jubilatoire ! Qui n'a jamais eu envie de hurler après une journée pourrie ? Les protagonistes de JAGAAAN n'hésitent plus à faire part de leurs états-d'âme malsains, le coeur et le corps ravagés par leurs pensées enfouies. A force d'étouffer ses émotions, on finit par craquer. Et quand c'est un frustré à tendance sociopathe qui doit se charger de protéger le monde des monstres, l'aventure risque d'être mouvementée !


Extrait du chapitre 1

On ne pouvait pas rêver mieux comme anti-héros pour renouveler le genre ! Au revoir les grands ténébreux au passé sombre, et bonjour au mec "normal". Jagasaki, que ce soit par son physique ou sa mentalité est presque repoussant. Mais étrangement, on aime le voir délirer avec ses pulsions meurtrières, c'est un héros exutoire pour les lecteurs et sa barbarie est un bol d'air cynique pour qui à l'impression de vivre un train-train quotidien semblable au sien. Surtout que le manga ne manque pas d'humour noir ! Entre Jagasaki qui chantonne aux pires moments, son adorable chouette de compagnie qui deale ses propres excréments et l'absurdité des événements quand le malheur frappe, le rire est à portée des zygomatiques. Le chara-design réaliste en rajoute une couche d'ailleurs puisque Kensuke NISHIDA n'hésite pas à rendre ses personnages grotesques, accentuant particulièrement sur les grimaces (peut-on parler de sourire à ce niveau ?) qu'on s'efforce de faire en société. La scène du miroir lors du premier chapitre est particulièrement marquante à ce niveau-là. Et le grotesque prend une allure à la fois monstrueuse et tordante avec les métamorphoses. Les pires défauts des victimes prenant corps, leur apparence frôlerait le ridicule si elle n'était pas synonyme de massacre imminent ! 

JAGAAAN est un double coup de maître. A la fois sur la puissance du scénario mais également des planches qui rivalisent d'ingéniosité pour exprimer l'étouffement des conventions sociales et l'animalité qui existe encore en chaque homme. "PAN ! T'est mort !" chante Jagasaki à tout va, le bougre nous a eu dès le premier tome

- Un grand merci aux éditions KAZE pour leur confiance ! - 

JAGAAAN / Scénario de Muneyuki KANESHIRO & dessins de Kensuke NISHIDA / KAZE1 tome actuellement / 7,99 €

Extrait du chapitre 1

Commentaires